Quel est le prix d’une vie?

Quand on s’appelle Lucky, qu’on a la chance du diable, alors peut-être la mort n’est-elle qu’un défi. Un jeu.

Ils étaient cent quatre-vingt-huit soldats sur la péniche en ce jour de juin 1944. Et Lucky a misé sa vie contre une hypothétique fortune. Alice, sa fiancée, n’a rien à perdre lorsque, vingt ans plus tard, elle apprend l’incroyable pacte conclu par Lucky.

De la Normandie aux Etats-Unis, elle se lance en quête de la vérité et des témoins de l’époque… au risque de réveiller les démons du passé.

Quatrième de couverture, éditions Pocket

 

Lorsque l’on commence la lecture des premières pages de Gravé dans le sable, la magie « Bussienne » opère immédiatement. Et pourtant, il s’agit ici de son premier roman, marquant ainsi ses débuts d’écrivain.

Aussi, pourriez-vous être tentés de croire que l’histoire soit banale, avec des personnages caricaturaux, des ficelles trop grosses, des longueurs narratives trop récurrentes, des codes du polar pas tout à fait maîtrisés. Détrompez-vous!

Dès la première page, nous voici projetés sur les plages d’Omaha Beach, en ce 6 juin 1944, avec les soldats du 9ème rangers. Les descriptions, précises, se font les témoins de la peur qui envahit chacun de ses gamins au sortir de la péniche. Le lecteur se trouve alors piégé. L’empathie dont il fait preuve envers les rangers depuis les premières pages ne pourra plus le quitter. Car sur cette péniche, qu’ils soient riches ou pauvres, à peine majeurs ou trentenaires, célibataires ou mariés, gamins ou pères, ils ne sont, in fine, que de la chair à canons. Alors, comment en vouloir à un gamin, riche et sans rêve de gloire, de vouloir échanger sa place dans la péniche avec un autre? C’est ce qu’a fait Oscar Arlington, trois jours plus tôt. Chaque ranger est invité à tirer un numéro qui déterminera son ordre de passage pour sauter de la péniche, courir sur cette maudite plage déserte et aller placer une charge d’explosifs au pied de cette falaise qui bloque l’accès au blockhaus de Pointe-Guillaume. Oscar tire le 4 et Lucky le 148… Mais seul Oscar a quelque chose à échanger : son numéro contre 1,44 million de dollars. Lucky accepte cet accord, heureux de savoir que, s’il ne réchappe pas à cette pluie d’obus, sa fiancée sera à l’abris des besoins. Un contrat est donc rédigé et dûment signé par quatre parties. Mais même lorsqu’on a une chance insolente, on n’échappe jamais à son destin… Lucky mourra, Oscar vivra et devra honorer sa dette.

Même à ses débuts, Michel Bussi manie la plume à la perfection. Il ne se laisse pas aller à trop de sentimentalisme, ou trop de descriptions crues et romancées du débarquement. Il est tout en retenue, comme s’il voulait s’excuser d’être le témoin de la barbarie de cette guerre. Il ne s’attache ici qu’à la psychologie des personnages et se met un point d’honneur à ne porter ombrage à aucun de ces rangers. Alors, même si Michel Bussi avoue lui-même que cette histoire sort directement de son imagination, même s’il s’excuse de ne pas respecter les codes du vrai roman policier, il est indéniable que le talent est là. Comme à son habitude, il se joue du lecteur en lui faisant toucher du bout des doigts la vérité – du moins le laisse-t-il croire – pour ensuite le confronter à des rebondissements imprévus, ébranlant ainsi toutes les convictions du lecteur.

Alors oui, j’avoue m’être totalement immergée dans cette intrigue. Bien que Michel Bussi se soit permis quelques libertés avec l’Histoire, cela n’entache en rien la crédibilité de l’action. Par ailleurs, j’ai fortement apprécié les différents visages que prenait ce roman : drame, enquête, road movie.

Sans doute Gravé sur le sable ne fait pas partie des incontournables du genre polar mais, en qualité de premier roman, il est le témoin direct d’un talent en devenir – talent qui ne cesse d’ailleurs de se confirmer…

Paru sous le titre Omaha Crimes aux éditions des Falaises en 2007 puis en 2014 chez Pocket pour cette nouvelle édition revue et corrigée par l’auteur.

 

 

 

2 réflexions sur “Gravé dans le sable ♥♥♥

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